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Au fil de l'Areuse


par Chantal Mottet, conteuse

13 mai 2009

Pour cette veillée, Chantal Mottet va évoquer nos légendes «Au fil de l’Areuse».

D'entrée, elle remarque que ce n’est pas une veillée comme au bon vieux temps, car si cela était vous, Mesdames, vous seriez venues avec vos tricots ou vos raccommodages et vous, Messieurs, vous seriez venus avec vos outils pour les réparer.

Et puis, le plus vieux peut-être aurait commencé à raconter des histoires...


L’Areuse
On la voit sortir, toute petite à sa source. Jean-Jacques Rousseau disait: A la source de l’Areuse, les cailloux sont verts, moussus. Le lieu est à l’ombre. La route de la Chaîne est utilisée par les sauniers pour livrer leur sel dans le Val-de-Travers. A Saint-Sulpice, la vouivre a caché le soleil. C’est un gros serpent, de la grosseur d’un tronc d’arbre, un œil unique, appelé l’escarbeau, de petites pattes. Les mulets en ont eu peur et sont tombés dans le fossé. Depuis ce jour-là, les caravanes de sauniers passent par La Côte-aux-Fées, puis Buttes par la Vy Saulnier. La vouivre a tenu en haleine le village de Saint-Sulpice. Un jour, Sulpice l’a tuée. La vouivre ne reste que sur les armoiries du village. Mais ce matin, passait un bonhomme avec son âne. L’âne ne voulait plus avancer. Peut-être avait-il peur de la vouivre, peut-être que les ânes voient des choses que nous ne voyons pas!
 

Fleurier-Môtiers-Couvet
Autrefois, l’Areuse passait au milieu de grands champs d’absinthe. L’absinthe a été interdite en 1910. Dès lors, ce qui est difficile n’est pas de trouver les plantes ou l’alcool ou l’alambic ou même d’écouler la marchandise, non, le plus dur est de faire taire les gosses.

Un jour, l'institutrice demande aux enfants de décrire comment leur maman faisait la lessive. Jimmy Vaucher, lui qui avait bien observé sa mère, a trouvé le travail facile. Sa mère disait à son fils, lorsqu’elle distillait de l'absinthe, qu’elle faisait la lessive et que parce que les pantalons de son père étaient très sales elle devait faire une cuite spéciale...

Dès lors, lorsqu’il y avait des odeurs particulières dans les environs de la maison Vaucher, on demandait à Madame Vaucher si elle faisait la lessive!

 

Couvet-Travers
L’Areuse coule en faisant de petits paliers. Parfois, elle fait des friselis. D’un côté, il y a un chemin goudronné pour les familles. De l’autre, un chemin de pierre pour les rêveurs. Le grand Henri et sa sœur Amélie vivaient dans une petite ferme avec une grande cheminée pour fumer la viande, une petite chambre jamais chauffée pour Henri, une plus grande chambre pour Amélie. Dans la grande cheminée, il y avait 7 saucisses à fumer. Or, le lendemain, il n’en restait que 6. Une a été volée. Le grand Henri, sur conseil de sa sœur, est allé voir une voyante: la Fatton des Verrières. Elle a pris trois œufs dans un panier, a cassé le premier dans une assiette et a dit: «Je connais le voleur: il est grand, il est près et vous le connaissez». Le deuxième œuf a dit qu’il venait la nuit après avoir repéré la plus belle saucisse durant la journée. Le troisième a dit qu’une fois le forfait commis, il mettait la saucisse sous le bras et il rentrait chez lui en passant par le corridor. Pour attraper le voleur, il faut badigeonner la plus belle saucisse avec une poudre spéciale. Depuis ce jour-là, il n’y a plus eu de vol. Le grand Henri a juste été surpris de voir que sa sœur avait passé trois jours enfermée dans les cabinets et que la seule vue d’une saucisse lui donnait le frisson!
 

Travers-Noiraigue
Le clocher d’un village de Bourgogne avait 4 cloches. La plus grosse et la plus vieille, c’est le bourdon. Mais un sonneur trop zélé l’a sonnée tellement fort qu’elle s’est fêlée et depuis ce jour-là on ne l’a fait plus sonner. Alors toute triste, elle attend le jeudi Saint, lorsque les cloches partent à Rome. La petite cloche aimerait bien aussi aller à Rome. Le bourdon l'invite alors à l'accompagner pour son dernier voyage. Elles suivent l’Areuse, traversent la Suisse et arrivent à Rome sans embûche pour chercher des friandises. Au retour, la petite cloche a pris quelques chocolats. La grosse cloche, sachant que c’est son dernier voyage à Rome, prend et mange tout le chocolat. Mais en chemin, elles subissent un orage. La grande cloche conseille de s’élever au-dessus des nuages, mais si la petite cloche y parvient sans peine, la grosse cloche, trop lourde de chocolat, reste dans l’orage, reçoit la foudre et éclate en mille morceaux dans un immense bang. De la poussière de cloche est née une fleur: l'ancolie.
 


Les fées
Elles vivent dans une grotte près de Couvet. La Fée Myrtille va à la réunion des fées en passant par le Gor des Brais, la chute de la Verrière, Champ-du-Moulin, et monte la pente jusqu’à Brot-Dessous. En chemin, elle aperçoit un chamois femelle qui s’était cachée pour mettre au monde un petit chamois. La fée l’a regardée et elle était émerveillée de voir le petit téter sa mère. Soudain, la mère s’est agitée. Elle allait et venait en tentant de faire que son petit la suive. Mais il avait encore les yeux fermés et la patte fragile. La fée comprit qu’il y avait des chasseurs dans les parages. Alors la fée a ouvert les yeux du chamois, puis ses pattes sont devenues fermes et il a pu suivre sa mère. Pendant ce temps, la fée a semé de la brume et les chasseurs se sont perdus. Arrivée en retard au rendez-vous des fées, Myrtille fut punie par la reine des fées. Elle l’a transformée en vieille femme en guenilles. Alors que Myrtille errait dans les Gorges de l’Areuse, elle a rencontré un petit chamois qui s’est approché d’elle, l’a léchée gentiment. C'est alors qu'elle a repris sa belle apparence. Dès lors, chaque fois qu’un petit arrive au monde, il suffira que la mère lui lèche les yeux pour que le petit chamois soit solide sur ses pattes et puisse suivre sa mère. En souvenir de cette rencontre, Myrtille a créé un petit buisson avec des baies bleues, presque noires, de la couleur des yeux du petit chamois.
 



Les Gorges de l’Areuse
Un pont est en métal, on dirait que c’est une partie de la Tour Eiffel. L’autre pont est en pierre, on dirait que c’est le diable qui l’a posé là. Il y a très longtemps, Balou le poisson, sa femme et ses petits, se reposaient dans un petit bassin. Balou n’était pas très futé et lorsque quelque chose l’étonnait, il faisait le caillou. Un pélican affamé est arrivé et a parlé à Balou en lui disant que la sécheresse régnait et que le bassin dans lequel vivait Balou allait bientôt être asséché. Le pélican lui a proposé de lui montrer un endroit où il serait bien, avec de la bonne eau. Balou est monté dans le bec du pélican et comme c’était tout noir, eh bien, il a fait le caillou. Arrivé dans un bassin un peu plus bas, le pélican l’a relâché. Balou a visité les lieux, les a trouvés à son goût. Il est remonté dans le bec du pélican qui l’a ramené dans son bassin où il y avait sa famille. Il a dit à sa famille de le suivre vers le nouveau bassin. Le pélican a chargé le premier petit de Balou, a volé un peu et l’a avalé. Puis toute la famille, sauf Balou père. Arrivé dans le nouveau bassin, Balou a rencontré un crabe en mal de voyage. Et voyant que sa famille avait disparu, Balou a eu une idée. Il a attiré le pélican en lui demandant de parler au crabe des risques de sécheresse. Le pélican s’est approché, le crabe a serré le cou du pélican très fort. Le pélican est mort le bec ouvert et a recraché tous les petits de Balou et leur maman.
 



L'ours
Huit chasseurs allant à la chasse à l’ours ont emporté avec eux huit bouteilles de vin. En chemin, ils imaginent déjà tout ce qu’ils feront avec la peau de l’ours. A chaque étape, ils boivent une bouteille. A la troisième, ils repèrent les traces d’un ours. Alors saisis de peur... ils ont ouvert une bouteille. Au pied du rocher, il y avait un creux. Ils ont attendu. Mais la mère ours qui était dedans a pensé qu’il valait mieux sauver sa peau. Elle est sortie précipitamment, passant devant les chasseurs qui, ébahis... ont ouvert une bouteille. Bien sûr, le soir, ils étaient bredouilles et c’est depuis lors qu’on dit qu’il vaut mieux ne pas vendre la peau avant de l’avoir tué l'ours.
 

Boudry
C'est à Boudry que l’Areuse va se jeter dans le lac et s’y fondre. Mais, tout au long de son parcours, l’Areuse nous donne son eau pour boire. Elle nous donne sa fraîcheur. Elle nous donne son énergie. Mais surtout, elle nous donne sa beauté.
 

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© Musée de l'Areuse, Boudry, 2002
mise à jour: 7 août, 2011